Festivités laotiennes

Nos visas laotiens, d’une durée d’un mois, arrivent bientôt à expiration. C’est un excellent prétexte pour aller passer quelques jours dans notre capitale asiatique favorite, Bangkok, qui est à peine à une nuit de train de Vientiane. Nous voilà partis en train couchette, un moyen bien confortable de voyager, bercés par le balancement du train, chacun dans sa couchette, dans l’intimité de ses rideaux et le calme de la nuit, seulement percé par les bruits ragoutants de raclement de gorge, crachats ou autres reniflements sonores, tellement typiques chez les asiatiques (mmmmh merciii :-)). Nous profitons du choix alimentaire bangkokien, tellement varié après de longues semaines de riz à toutes les sauces, et nous faisons du lèche vitrines à tire larigot… ca fait du bien une fois l’an pour l’accro du shopping que j’étais, non, décidemment, que je suis !!! :-) Résultat ; une caisse de 8 kg (aïe) qui revient par bateau vers la Belgique… On découvre un peu mieux le quartier de Thong Lo où nous logeons à chacune de nos venues dans la capitale thaïe, et découvrons un petit marché de nuit où manger un délicieux phad thai à toute heure de la nuit (je connais un groupe de personnes à qui cela va faire plaisir tiens ;-) Un tremblement de terre a lieu en Birmanie, il est ressenti jusqu’au Laos et même au niveau des plus hauts immeubles de Bangkok, nous, nous ne sommes même pas au courant, nous avons du croire que c’était le skytrain qui passait :-) !




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Phil repart au Laos de son côté pour un reportage avec l’ONU dans le sud du pays, et moi je profite encore un peu des belles boutiques et des petites soupes de rue, et je me perds dans Bangkok… Je rejoins Vientiane et m’y ballade paresseusement, traînant sur les berges du Mékong et dans les temples, ou assise sur une balançoire au parc, observant les locaux venant s’entraîner sur les machines de musculation mises à la disposition du public. Phil rentre de Paksé, son disque dur rempli de photos à retravailler, et un nouveau rendez-vous fixé avec l’ONU 5 jours plus tard. 5 jours, c’est largement suffisant pour bouger un peu… Sur les conseils de Vincent, le sympathique patron du bar à bières belges de Vientiane, nous décidons d’aller les passer à Vang Vieng, et ce malgré nos aprioris sur cette ville.


Grand bien nous a pris, nous dégotons une petite guesthouse à bungalows de l’autre côté de la rivière. Nous y passons les jours suivants à bosser dans des hamacs dans le jardin, Phil retravaillant ses photos pour l’ONU et moi postulant pour une offre d’emploi intéressante au WWF et vous rédigeant aussi mon précédent post. Paysages à couper le souffle, avec des montagnes karstiques escarpées en fond de décor, et ambiance familiale chez Noé, Mango et leurs 2 enfants, Ki et Ke. Nous sommes les seuls hôtes avec Sophie et Benoit, un couple d’Alsaciens avec lesquels le courant passe immédiatement. Nous profitons des pauses de Phil pour jouer une petite partie de pétanque ou de badminton, ou pour prendre l’apéro… bref, pas trop dure la vie dans notre nouveau petit havre de verdure ! Nous laissons donc de l’autre côté de la rivière les vieux ados ivres sortant des bars, ou à moitié nus en train d’acheter une crêpe à une vendeuse de rue ou encore abrutis devant un épisode de Friends en dégustant une happy pizza (depuis 5 ans que ca tourne, ils ne se sont même pas mis à la page avec How I met your mother !). Vang Vieng n’a décidemment pas changé. Rien à faire, ce n’est pas notre conception du voyage, ni du respect d’une autre culture.


Forcés et contraints, nous repartons pour Vientiane pour un shooting avec l’UNODC (United Nations Office against Drugs and Crime), le bureau de l’ONU qui lutte contre la drogue : pour cette campagne, diverses stars du Laos, chanteurs, DJ, sportifs, miss Laos 2010, sont réunies pour dire NON à ce fléau. Une fois le shooting terminé, nous reprenons immédiatement la route aux innombrables virages, vers notre petit bungalow. Au programme : une partie de pêche avec Sophie, Benoit et les enfants qui trépignent déjà d’impatience, et un baci, une espèce de grande fête de village où, après une petite cérémonie dédiée aux esprits, on mange, on boit et on danse, et qui a lieu pour n’importe quel prétexte (naissance, mariage, rétablissement, et, dans le cas qui nous occupe, l’imminence du nouvel an bouddhiste, appelé Pi Mai, qui sera fêté dans 5 jours… c’est donc un échauffement !). Encore une occasion pour nous de découvrir l’esprit festif et généreux du peuple lao. Festif sauf quand il s’agit de danser… la danse traditionnelle se fait avec les mains, qui miment le lotus en train de s’ouvrir et se refermer, mais vu l’expression des danseurs, on se croirait plus à un enterrement… quelques bières sont nécessaires pour dérider les visages. Mango est, come toute laotienne qui se respecte, une véritable experte des plantes… au bord de la rivière, elle nous dégotte toute une série de plantes qui lui serviront à nous concocter un délicieux laap le soir même (une espèce de salade avec de la viande et des herbes, aromatisée au piment et à la citronnelle).


Après ces bons moments passés ensemble, il est temps pour nous de continuer notre route vers Luang Prabang, où nous avons prévu de passer le nouvel an, avec Sophie et Benoit. En effet, au mois d’avril, le peuple lao célèbre le nouvel an bouddhiste, Pi Mai, pendant 3 jours. Ce festival, particulièrement impressionnant à Luang Prabang, célèbre l’imminence de la saison des pluies. Au cours de cette grande fête ont lieu de nombreuses cérémonies, des processions, des réunions de famille avec grands repas, mais surtout la plus grande bataille d’eau du monde ! A cette occasion, tout doit être purifié par l’eau : les maisons, les rues, les gens, les statues de bouddhas, les véhicules qui passent, tuk-tuk, voiture ou mobylette. Dans les rues, les gens s’aspergent mutuellement, avec de petits récipients ou carrément à coup de seau ou de fusils à eau… Les familles laotiennes se rendent au temple ou sur la plage d’une petite île voisine de Luang Prabang et, en respect avec la tradition, construisent des stupas de sables, qu’elles décorent avec des bâtons d’encens, des bougies, des fleurs, des banderoles et saupoudrent le tout de talc, dont le reste du paquet est déversé sur les passants (nous laissant plus blancs que des fallangs :-)… Nous profitons des festivités, nous prêtant au jeu…. Pas désagréable toute cette eau en cette période de l’année théoriquement la plus chaude et où la température dépasse largement les 40°C…. Je trouve directement cela moins drôle quand l’eau est tentée de rouge et que mes cheveux commencent à prendre une teinte rose… mais ouf, contrairement au bleu de méthylène, ca part au lavage :-). A côté de ces festivités, nous profitons de la ville magnifique qu’est Luang Prabang, qui regorge de temples anciens et de petits marchés, et des cascades toutes proches de la ville, où s’en vont piqueniquer les familles pour se remettre de Pi Mai dans un cadre de verdure.



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Nous partons ensuite en reportage photo pour couvrir les activités de l’UNODC, le bureau des nations unies luttant contre la drogue, et donc contre la culture du pavot dans ces régions du triangle d’or. Le Laos est en effet le troisième producteur mondial d’opium, derrière l’Afghanistan et la Birmanie. Leur méthode de lutte passe par l’amélioration des conditions de vie dans les villages les plus défavorisés, notamment dans les provinces de Rwa Pan (à la frontière du Vietnam), et d’Udumxai (près de la frontière chinoise). Pour atteindre ces villages, nous accumulons les heures de voyage sur routes de montagnes défoncées, d’abord en bus local, hurlant du hard rock laotien (sisi ca existe !) à 3 heures du mat pour tenir le chauffeur (ainsi que le reste du bus) éveillé, puis en 4X4 de l’ONU, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de route mais une piste, puis au-delà de la piste sur un chemin à buffles, au travers de la jungle épaisse et des rivières. Nous atteignons alors des villages plus que reculés, que même l’électricité n’a parfois pas encore atteint. Et peu d’européens au vu des yeux qui s’arrondissent sur notre passage (l’équipe de l’UNODC est exclusivement asiatique) et des enfants qui s’enfuient à notre approche. Et là, à nouveau, l’accueil des laotiens dépasse sa réputation légendaire : ces villageois, malgré leur pauvreté, mettent un point d’honneur à faire le meilleur accueil du monde à l’équipe de l’UNODC dont nous faisons temporairement partie… ils nous préparent des repas de rois, étalant des plats variés sur des tables basses autour desquelles nous prenons place (échangeant même les assiettes de chien contre du poulet pour la table autour de laquelle sont assis les européens ;-), et insistant pour partager un petit verre de laolao à la fin du repas (très bien, ca tue les bactéries en ces lieux où l’hygiène n’est pas des meilleures). Malgré la barrière de la langue (ici, nous ne pouvons même pas utiliser les rudiments de laotien que nous avons appris ces dernières semaines, les villageois y parlent encore un autre dialecte!), les accolades et les sourires bienveillants ne mentent pas sur la gentillesse et la bienveillance de ces gens. Il faut dire que l’UNODC a fait ici de l’excellent travail, fournissant aux habitants les structures et outils nécessaires à diverses activités génératrices de revenus alternatives à la culture du pavot, généralement dans les domaines de la culture et de l’élevage, et améliorant les conditions de vie dans les villages (accès à l’eau potable, construction de dispensaires et écoles, mise en place d’un système d’épargne et de microcrédit, et d’une banque de riz pour les périodes de pénurie). Les villageois montrent une motivation démesurée et s’investissent à fond dans les projets. C’est probablement ce qui fait que les projets fonctionnent et perdurent pour une grande majorité après le départ de l’équipe chargée du projet. Quel contraste avec ce que nous avons pu voir en Afrique, où les habitants regardaient souvent les projets avec distance et où l’autonomie future des projets finalisés était souvent sujette à de gros doutes pour l’équipe qui le laissait entre les mains des locaux. On ressent ici, au travers de leur énergie au travail, l’investissement de tous à construire, entretenir, cultiver, innover, la grande motivation des habitants à développer le village, et on se dit que, même si il en est encore très loin, le Laos ne tardera pas à suivre la Thaïlande dans son chemin vers un meilleur développement. En espérant qu’il conservera son âme, sa simplicité, sa curiosité et son humanité sans sombrer dans le désir de posséder toujours plus, un fléau qui a entre autre pour conséquence de transformer le touriste étranger en un simple portefeuille, comme dans tant d’autres endroits du monde qui ont perdu cet esprit d’accueil. D’une façon peut être un peu naïve, et que seuls peuvent comprendre ceux qui y ont visité ce pays, je fais toute confiance au Laos et à ses habitants sur ce point….


Pas de photos sur ce coup-ci, car elles sont soumises au copyright du contrat que Phil a signé avec l'ONU....


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