Petit détour dans l'Inde du plancher des vaches

Nos visas indiens en poche, nous entrons en Inde avec un petit jour de retard par rapport à la date d’expiration de nos visas népalais… jour de retard qui passera inaperçu aux yeux des douaniers (héhé, chacun son tour d’arnaquer l’autre ;-)). Et là, une fois de plus, nous changeons de monde : on entre dans un dépotoir bondé : les rues sont sales, puantes et pleines de monde… une foule beaucoup plus masculine qu’au Népal… mais où sont passés tous les beaux saris colorés ? L Une foule plus bovine aussi, avec des vaches sacrées se faisant un malin plaisir de jouir de leur rang et de traîner au milieu des avenues, toisant dédaigneusement la masse klaxonnante bloquée en face d’elles.



A notre arrivée à la gare routière frontalière, notre bus public à direction de Vârânasî roule déjà, portières ouvertes. Nous avons à peine le temps d’y balancer nos sacs à dos et de sauter en marche. C’est quoi cette manie de partir en avance ? Nous découvrirons plus tard que c’est une habitude des chauffeurs de bus, qui leur sert de prétexte pour foncer comme des dératés pendant tout le reste du trajet ! Comme si quelqu’un espérait que le bus arrive à l’heure ?!? Et nous voilà partis pour un concert ininterrompu de 14 heures de klaxon en direction d’une des villes les plus saintes d’Inde. Quelques pauses dans des gares puantes, sans toilettes svp, mais avec une odeur d’urine dépassant celles cumulées de l’ensemble des toilettes publiques belges, non, européennes. OK, la gare est un urinoir en elle-même, mais un urinoir bondé, les passagères s’abstiendront, je m’y fais, et je me rabats sur la faim qui ronge mon estomac et dégotte de délicieux samossas à la pomme de terre et aux épices. Mmmmh un délice épicé qui m’enflamme la bouche et me donne soif. Zut, m’hydrater, est-ce vraiment une bonne idée avec les 8 heures de trajet qui nous restent sans espoir d’arrêt pipi? Une fois arrivés à Vârânasî, les rickshaws nous demandent plus de 10 fois le prix d’une course et ne négocient pas facilement… OK, on n’est pas arrivés ! Surtout qu’après un slalom intense dans un trafic incroyable, croisant des magasins de saris plus colorés les uns que les autres, il nous dépose à l’entrée de la vieille ville, un labyrinthe piétonnier de ruelles étroites dans lequel nous nous perdons pour enfin atteindre notre guesthouse, dont le slogan affiché sur la façade est « Yes, we are less dirty ». Que du bonheur !



Vârânasî est une ville sainte traversée par le Gange. C’est un lieu de pèlerinage pour de nombreux hindouistes qui viennent se purifier dans l’eau sacrée, s’y baignant, la buvant, ou y inhumant leurs morts qui sont ensuite incinérés sur ses berges. De nombreux fidèles, sentant approcher les derniers jours de leur vie présente, se rendent ici avec leur famille et venant y attendre leur dernier souffle, priant pour sortir du cycle perpétuel de réincarnations. La ville est aussi peuplée de sâdhus, ces hommes saints et colorés en quête spirituelle, ayant renoncé à la société, ne possédant rien et se nourrissant uniquement de dons.



Tout cela autour de l’eau sacrée du Gange, une eau dont la concentration en Escherichia Coli, la bactérie fécale qui a tellement fait parler d’elle ces derniers temps en Europe, est plus de 3 fois supérieure à celle de la limite acceptable pour une eau de baignade selon les normes occidentales. Une eau qui, à chaque pluie de la période des moussons (dans laquelle nous entrons actuellement) récolte tous les détritus, l’urine, les bouses de vaches et autres excréments qui jonchent les ruelles crasseuses de la vieille ville qui surplombe le fleuve. Santé ! :-)



Vous le comprenez donc : oui, je trouve l’Inde sale, profondément sale, bien plus sale que tout ce que nous avons pu rencontrer jusqu’ici dans notre voyage. D’ailleurs, elle aura raison des 10 mois et demi d’entrainement intensif que mes intestins viennent de subir pendant notre trip… je tombe malade, mais dans un timing relativement bien calculé vu que je me retrouve bloquée au lit justement un jour de mousson intense et non interrompue, une journée où sortir rimait avec patauger en tongs dans l’eau des égouts (ou semblants d’égouts) qui avaient débordé. Bon calcul donc, ;-). Tu m’étonnes que je sois tombée malade : au petit déjeuner, Phil trouve des fourmis dans son thé et des crottes de souris dans ses crêpes. Si ce n’est ce jour-là, nous arpentons les rues de la vieille ville, ses bazars semblables à des décors de films, et longeons le fleuve bordé d’escaliers où dorment des sâdhus colorés ou nous laissons transporter par la spiritualité dégagée par la ville au lever du soleil depuis un petit bateau. Nous observons, assis sur ces escaliers, la vie locale, les familles venant se purifier et se baigner, les gosses jouant au criquet, véritable sport national ici suscitant les passions, et nous faisant sans cesse aborder par les rabatteurs, guides, masseurs,…



Après ce bain de spiritualité hindouiste, nous reprenons nos sacs en direction d’Agra, la ville où est situé le Taj Mahal. Pour nous y rendre nous prenons le train de nuit, franchement confortable et propre (malheureusement pas silencieux, mais bon, on ne peut pas tout avoir hein… et qui aurait l’idée de demander à des indiens de faire le minimum de bruit possible quand ils montent dans un train à 3h du matin ???). Une fois le soleil levé, les paysages défilent, nous laissant apercevoir des campagnes inondées et des villages franchement pauvres. En cette heure matinale, nous ne comptons plus les villageois accroupis, pantalon baissé, faisant leurs besoins aux bords des voies sans accorder la moindre attention au train qui passe.


De même quand noud reprendrons le train de Agra vers Delhi quelques jours plus tard, nous traversons dans la périphérie de Delhi les bidons-villes de loin les plus pauvres que nous aurons vus au cours de notre voyage, avec des gens dormant à même le sol ou squattant des chantiers, ou se réunissant autour d’un feu. Rude la pauvreté de l’Inde. L



Une fois arrivés à Agra, nous nous rendons dans un parc situé à l’arrière du Taj, exactement dans son alignement, de l’autre côté de la rivière Yamuna (la visite attendra le lendemain à l’aube pour éviter le flot de groupes touristiques et l’avoir pour presque nous seuls). C’est le souffle coupé que je contemple ce joyau architectural splendide aux murs de marbre blanc incrusté de pierres précieuses, à la symétrie parfaite et aux courbes harmonieuses. Un bijou qu’un empereur éperdu d’amour fit construire comme mausolée à sa femme décédée lors de son quatorzième accouchement (on ne va pas dire qu’ils ne l’ont pas cherché non plus hein !)… et qu’il regarda depuis la fenêtre de la cellule du fort d’Agra où son fils l’enferma après l’avoir destitué.


Hormis le Taj, nous errons dans les ruelles moins touristiques de l’arrière d’Agra, et profitons des bazars où se succèdent les scènes de vie, admirant les saris colorés et les montagnes d’épices, les étales de fruits, les oreilles des femmes parées de multiples boucles dorées,… Avec un thermomètre dépassant largement les 40°C, nous cherchons un peu de fraicheur dans les parcs où viennent se délasser les familles de touristes indiens après avoir visité leur fierté nationale.



C’est à nouveau en train que nous rejoignons Delhi pour regagner le Ladhak, où nous avons prévu de poursuivre notre voyage.



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